Nous avons eu la grande chance d'assister à la crémation de Don Antonio Blanco car les crémations sont devenues très occasionnelles en raison de leur coût prohibitif. La plupart des balinais sont enterrés puis, quelques années plus tard, une crémation collective à l'échelle d'une famille ou d'un village est organisée pour partager les frais, mais ce n'est plus systématique.
La crémation est la cérémonie la plus importante dans la vie balinaise. En conséquence, les moyens mis en oeuvre sont incroyables. C'est là que l'art balinais de l'éphémère prend toute sa dimension. |
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La cérémonie commence par une procession qui est constituée d'un taureau (avec ses attributs), d'une tour de type meru avec ses toits multiples, symbole de la montagne sacrée, et d'un escalier d'accès à cette tour. La hauteur de la tour dépend de la renommée du défunt. Pour Antonio Blanco, la tour avec ses 5 toits était d'une hauteur respectable. Ces 3 édifices sont constitués d'une charpente en bois et bambou recouverte de papiers colorés, de tissu, de ficelles et de fleurs. Leur base est formée d'un treillis de bambou permettant à plusieurs dizaines d'hommes de porter ces édifices.
Cet ensemble magnifique de "chars" va parcourir plusieurs centaines de mètres pour aller du domicile du défunt au terrain vague prévu pour la crémation. Il a donc fallu couper l'électricité et le téléphone pour enlever les fils aériens qui auraient gêné la progression du cortège. |
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Quand nous sommes arrivés, le matin vers 10h00, l'ensemble du cortège était en attente. Plusieurs personnes portaient des offrandes. On voit, sur la 2ème photo ci-dessus, le portrait du défunt porté toujours en tête de cortège. Les cendres du défunt seront mis dans l'urne décorée sur la 3ème photo ci-dessus (celle de derrière). Le symbole de l'âme du défunt, porté par la femme sur la 4ème photo ci-dessus, sera emmené au bord de la mer puis au temple mère, le pura Besakih pendant une dizaine de jours. Le cochon embroché, tenu par une femme sur la photo de gauche, est le symbole du corps mort. Il va servir tout le long de la cérémonie à détourner les mauvais esprits du vrai corps du défunt. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Le cercueil, recouvert d'un tissu rouge, est apporté du domicile d'Antonio Blanco vers la tour. Il est monté par l'escalier et attaché dans la tour par des cordelettes. Le personnage en noir en haut de l'escalier est un des fils du défunt. Beaucoup d'hommes ont un tea-shirt au nom Don Antonio Blanco. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Puis la procession se met en route avec, en tête, le taureau chevauché par un conducteur qui va donné un certain nombre d'ordres. L'escalier suit le taureau puis la tour ferme la marche. La TV nationale est présente sur les lieux et de nombreux balinais et touristes assistent à cette cérémonie de part et d'autre de la route. Plus il y a de monde, plus la fête (car s'en est une) est réussie. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Le but de la procession est double: D'abord éviter la rencontre des mauvais esprits qui pourraient perturber la séparation de l'âme du défunt et du corps et ensuite désorienter l'âme du défunt qui aurait tendance à trop s'attarder près du corps. Pour cela, sous les ordres des prêtres de la cérémonie, relayés par les conducteurs de chaque char, les porteurs vont avancer par saccades, reculer, faire tourner les édifices, les faire pencher d'un côté et de l'autre pendant tout le trajet. L'énergie déployée est vraiment considérable! A chaque croisement de route, le prêtre fait stopper la procession pour la refaire démarrer au moment propice, quand les esprits, qui vont toujours en ligne droite, sont passés.
Derrière la tour, sur le char, le chef des gamelans donne le ton à l'ensemble des musiciens qui suivent la tour. Le prêtre, responsable de la procession est également sur le char transportant la tour. |
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Arrivée sur les lieux de la crémation, terrain herbeux entouré d'arbres, la tour est de nouveau reliée à l'escalier. Un homme monte les escaliers pour apporter un couteau spécial réservé pour les crémations. Il y en a un par village. Ce couteau, béni, sert à couper les cordes qui retiennent le cercueil à l'intérieur de la tour. L'oiseau du paradis, tenu par l'homme qui descend les escaliers, est le symbole de la séparation de l'âme et du corps.
Le cercueil est ensuite descendu par les escaliers pour être mis dans le taureau. Durant le transfert, de nombreuses personnes vont toucher le cercueil. |
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Puis une longue attente commence. La TV nationale , ainsi que des amateurs montent sur l'escalier pour filmer le transfert du corps. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Un prêtre du temple des morts, invoque le dieu du soleil et du feu et va donner le signal pour commencer la crémation.
Pendant ce temps la tour et l'escalier sont brûlés car leur fonction est terminée. |
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La crémation peut commencer. La base du taureau est entouré de troncs de bananier qui empêchent le feu de partir sur les côtés. Le taureau a été installé sous un dais. Le taureau s'enflamme comme une torche rendant le spectacle impressionnant avec des flammes de 15 m de haut. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Le papier et le tissu brûlent très rapidement, laissant pendant un instant la charpente de l'édifice à nu. Un apport en gaz permet de consumer la dépouille mortelle car le feu de bois n'a pas la température nécessaire pour brûler entièrement un corps. Nous sommes partis peu de temps après car les restes du corps allaient se consumer pendant encore de nombreuses heures.
Les cendres sont ensuite mises dans l'urne vue lors de la procession et emportées pour être jetées dans la mer . |
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